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Mieux connaître le vieillissement des composites soudés - Par : Vincent Rohart, Louis Laberge Lebel, Martine Dubé,

Mieux connaître le vieillissement des composites soudés


Vincent Rohart
Vincent Rohart est étudiant au doctorat au Département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur l’étude et l’amélioration de composites soudés pour des applications dans l’aéronautique et l’aérospatiale.
Programme : Génie mécanique 

Louis Laberge Lebel
Louis Laberge Lebel Profil de l'auteur(e)
Louis Laberge Lebel est Professeur au Département de génie mécanique de Polytechnique Montréal. Ses intérêts de recherche comprennent les méthodes de fabrication avancées, les matériaux composites et le génie aérospatial et aéronautique.

Martine Dubé
Martine Dubé, professeure au Département de génie mécanique, se spécialise dans le développement des procédés de mise en forme et d’assemblage des matériaux composites.
Programme : Génie mécanique 

Les joints de composites sont très utilisés dans l'aéronautique

L’image d’en-tête a été achetée sur Istock.com. Des droits d’auteur s’appliquent.

RÉSUMÉ:

Résumé : Le soudage des joints composites est de plus en plus étudié parce que son utilisation permettrait de fabriquer des structures aéronautiques plus légères en moins de temps. Les propriétés de ces joints, lorsque soumis à des conditions environnementales difficiles, ne sont pas connues. Il apparaît que leur tenue mécanique est fortement influencée par la température et que l’interface tend à ne plus être cohésive à haute température. L’objectif principal de cette recherche est d’évaluer l’influence de l’humidité et de la température sur les joints soudés. Mots clés : Composites thermoplastiques; Soudage par résistance; Haute température

Les composites, matériaux d’avenir

Aujourd’hui, on cherche, dans les domaines de l’aéronautique et de l’aérospatiale, à réduire le poids des avions et des fusées pour diminuer leur consommation de carburant. Dans cette optique, l’aluminium habituellement utilisé dans les structures a d’ores et déjà été remplacé par ce que l’on appelle des composites sur certains appareils. Ces matériaux sont composés d’un renfort rigide, généralement des fibres de carbone, et d’une matrice polymère dont le rôle est de maintenir de façon cohésive le renfort et de répartir les charges. Ils ont l’avantage de posséder d’excellentes propriétés mécaniques pour un poids faible [1] et ils composent aujourd’hui à plus de 50 % la structure des Boeing 787 [2] et des Airbus A350XWB.

Un soudage rapide et performant

Les matériaux composites peuvent être liés par différents procédés : collage, boulonnage ou encore, si on utilise une matrice thermoplastique, soudage. En effet, l’avantage des thermoplastiques consiste en leur capacité à pouvoir être fondu par chauffage et durci par refroidissement de multiples fois. Parmi les procédés de soudage, on peut utiliser le soudage par résistance (Figure 1). Il consiste à introduire un élément conducteur électrique poreux entre les deux composites à lier qui, avec le passage d’un courant dans cet élément, va générer de la chaleur par effet Joule jusqu’à dépasser la température de fusion de la matrice thermoplastique. Cette dernière va donc fondre en comprimant le joint, les molécules de polymères pourront alors se diffuser à l’interface à travers l’élément conducteur qui va être inclus dans le joint. Ce dernier se consolidera après refroidissement [3]. Ce type de liaison a l’avantage d’être rapide, efficace et de faible poids. Le soudage par résistance est prometteur par sa simplicité et produit des joints très résistants aux cisaillements et à la fatigue [4]. Cependant les applications dans l’aéronautique nécessitent que ces joints gardent de bonnes propriétés après avoir subi diverses variations environnementales telles la température et l’humidité.

Les joints fait par soudage par résistance sont sensibles à l'humidité

Figure 1 Représentation schématique du procédé de soudage par résistance

Effets de l’environnement sur les composites soudés

Ce projet a donc comme but premier d’étudier le vieillissement des joints composites soudés par résistance. Les joints composites étant inhomogènes par la présence d’interfaces matrice/renfort et matrice/élément conducteur, ils sont donc disposés à être dégradés par des conditions hygrothermiques difficiles. L’étude de telles dégradations est d’une importance critique puisqu’il est nécessaire de connaître la durabilité de ces joints pour pouvoir les utiliser dans l’aéronautique. De cette étude sera alors développé un modèle analytique basé sur l’absorption d’humidité en fonction de la température pour déterminer les propriétés mécaniques du joint selon les conditions environnementales. Ce modèle sera validé par la suite par des tests mécaniques.

De plus, les vols dans l’aviation civile étant effectués à des altitudes de croisières supérieures à 30 000 pieds, où la température est inférieure à -50 °C, l’incidence des cycles de gel et de dégel sur les joints composites sera également étudiée, en particulier lorsque ces derniers ont déjà absorbé de l’humidité.

L’interface élément conducteur/matrice, une faiblesse?

L’élément conducteur et la matrice du composite, de par leurs différences de propriétés chimiques et physiques (différences de gonflement causées par l’environnement, compatibilité chimique, etc.), ont une liaison relativement faible, ce qui produit un joint potentiellement faible et peut mener à une rupture prématurée. Cette interface faible, en plus d’être suspectée d’abaisser les propriétés mécaniques du joint, peut éventuellement laisser l’humidité s’infiltrer. L’amélioration de cette interface par des traitements chimiques ou physiques de l’élément chauffant ou de la matrice permettra de confirmer l’hypothèse selon laquelle cette faible adhérence cause une faiblesse du joint. Elle permettra aussi de trouver des solutions pour renforcer l’efficacité du joint composite vis-à-vis de son environnement.

Image d'un joint obtenu au moyen de soudage par résistance

Figure 2 Élément conducteur dans une matrice de polymère

D’ores et déjà, il a été mis de l’avant que la température joue un rôle crucial dans les propriétés mécaniques des joints soudés, et en particulier si celle-ci dépasse la température de transition vitreuse de la matrice, une plage de températures charnières à laquelle les propriétés d’un polymère changent. La rupture de ces joints montre une tendance de la matrice à se détacher de l’élément conducteur métallique à l’interface du joint à mesure que la température augmente pendant les tests mécaniques. Ces résultats préliminaires font présumer que l’interface s’affaiblit avec la montée de la température, pouvant dès lors permettre une dégradation par l’humidité.

Dans sa globalité, ce projet permettra une utilisation plus évidente des composites thermoplastiques pour des applications de pointe. Les matériaux pouvant être utilisés dans l’aéronautique, par exemple, sont nombreux. Il en est de même pour les procédés permettant de lier ces matériaux entre eux. En connaissant l’évolution des propriétés mécaniques des joints soudés par résistance en fonction des conditions environnementales, nous serons en mesure de les distinguer des autres techniques de liaison et ainsi d’apporter des arguments pour promouvoir leur utilisation.

 

Vincent Rohart

Profil de l'auteur(e)

Vincent Rohart est étudiant au doctorat au Département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur l’étude et l’amélioration de composites soudés pour des applications dans l’aéronautique et l’aérospatiale.

Programme : Génie mécanique 

Profil de l'auteur(e)

Louis Laberge Lebel

Profil de l'auteur(e)

Louis Laberge Lebel est Professeur au Département de génie mécanique de Polytechnique Montréal. Ses intérêts de recherche comprennent les méthodes de fabrication avancées, les matériaux composites et le génie aérospatial et aéronautique.

Profil de l'auteur(e)

Martine Dubé

Profil de l'auteur(e)

Martine Dubé, professeure au Département de génie mécanique, se spécialise dans le développement des procédés de mise en forme et d’assemblage des matériaux composites.

Programme : Génie mécanique 

Laboratoires de recherche : CÉRIÉC-Centre d’études et de recherche intersectorielles en économie circulaire 

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