28 Juin 2021 |
article de recherche |
Les technologies pour la santé , Les systèmes intelligents et autonomes
Vers une médecine personnalisée aux soins intensifs
Le 20 mai 2021, le Fonds de recherche du Québec – santé (FRQS) annonçait la création de la Chaire de recherche sur le développement et validation de systèmes d’aide à la décision clinique à l’aide de l’intelligence artificielle.


Achetée sur Istockphoto.com. Droits d’auteur.
La dernière année a mis en évidence les ressources limitées de notre système de santé. Année après année, la santé et les services sociaux ont beau se mériter la part du lion du budget provincial, les ressources allouées ne semblent jamais suffisantes pour servir notre population vieillissante. Ce manque de ressources se fait particulièrement sentir aux soins intensifs, où une surveillance continue des patients nécessite un ratio personnel/patient élevé. Parallèlement, le volume et la diversité des informations cliniques ont énormément augmenté ces dernières années, imposant à l’équipe soignante des connaissances médicales de plus en plus poussées.
Dans le cadre de la Chaire de recherche sur le développement et validation de systèmes d’aide à la décision clinique à l’aide de l’intelligence artificielle, les chercheurs de l’ÉTS vont tirer profit des progrès rapides des systèmes de collection de données cliniques et de l’intelligence artificielle pour améliorer la prise en charge des patients. Leur objectif : se servir des nombreuses données cliniques afin de mettre en place un système informatique d’aide à la décision clinique (SIADC).
Système informatique d’aide à la décision clinique
Un système informatique d’aide à la décision clinique (SIADC) est un ensemble d’interfaces qui résument les informations afin d’aiguiller un professionnel de la santé ou un gestionnaire dans la prise de décisions. Ce système est alimenté de différentes données de type médical, lesquelles sont traitées par des algorithmes d’intelligence artificielle.
Plusieurs défis devront être relevés lors de la construction du moteur de décision et dans la conception des interactions du système avec les humains. Le SIADC devra aussi composer avec une multitude de données, issues de différents systèmes et présentes sous différentes formes. Pour y arriver, une équipe interdisciplinaire de chercheurs dirigée par les professeurs Rita Noumeir (ÉTS) et Philippe Jouvet (UdeM), ont créé une cyberinfrastructure de données cliniques et de recherche, unique tant au Canada que dans le reste du monde. Parmi les données qu’elle contient :
- Données cliniques : données démographiques, évaluations cliniques, diagnostics, notes d’examen physique, résultats de laboratoire, images médicales, résultats de tests spécialisés;
- Données thérapeutiques : doses et administration de médicaments, données de ventilateur, données de machine de suppléance de défaillance d’organes;
- Données organisationnelles : nombre, gravité des maladies, répartition des patients, répartitions des infirmières ainsi que de leur charge de travail.
- Données à venir : acquisitions d’images RVB, de profondeur et d’infrarouge.
Ces données sont donc massives, variées et couvrent complètement l’évolution dans le temps du patient. L’objectif à long terme est de les utiliser pour aider les soignants dans leurs prises de décisions.
Travaux de la Chaire des prochaines années
Au cours des trois prochaines années, les chercheurs travailleront sur certains aspects plus précis du SIADC, dont voici un aperçu.
Détection rapide de la détresse vitale
Chez les enfants hospitalisés, 28 % des événements de défaillance respiratoire aiguë ne sont pas reconnus, ce qui mène malheureusement à des décès. Ce projet vise à quantifier la détresse respiratoire en évaluant l’altération des fonctions respiratoires, neurologiques et hémodynamiques en temps réel. Les méthodes utilisées sont basées sur l’analyse vidéo, l’apprentissage machine et l’analyse multimodale.
Des taux de réadmission aux soins intensifs pédiatriques réduits
Le taux de réadmission dans les 48 h suivant la sortie des patients des soins intensifs varie de 1,7 % à 3,4 %. Ces réadmissions non prévues ont un impact important sur les patients et l’équipe soignante en plus d’entraîner des coûts supplémentaires pour les hôpitaux. En effet, dans ces cas, la durée moyenne du séjour passe de 5 à 35 jours. À l’aide de méthodes d’apprentissage machine, un modèle sera développé afin de caractériser le facteur de risque de réadmission. Ce modèle sera raffiné en intégrant les données spécifiques au patient.
Des flux de patients optimisés
Aux soins intensifs chaque infirmière se voit attribuer un seul ou deux enfants. Selon l’évolution de l’état de ses patients, des soins à donner et des compétences requises, une réattribution des patients entre les infirmières survient en moyenne deux fois par jour, souvent accompagnée d’un changement de chambre. Ces transferts augmentent la charge de travail du personnel de l’unité, donc diminuent proportionnellement sa capacité d’admission.
Afin d’optimiser les flux de patients, deux algorithmes combinés proposeront la répartition des infirmières pour le prochain quart de travail et le positionnement de l’admission suivante. Le premier automatisera l’attribution des patients aux infirmières en tenant compte des horaires, de l’ancienneté, des règles et des données du patient; le deuxième optimisera la charge de travail en se basant sur un modèle de calcul du coût organisationnel d’un transfert intraservice.
Un programme novateur et unique au monde
L’avènement d’une médecine personnalisée passe par l’analyse des mégadonnées cliniques. La Chaire contribuera à la formation de professionnels polyvalents, capables d’œuvrer à l’interface de l’intelligence artificielle et des sciences de la vie, améliorant la capacité et la qualité des soins prodigués de notre système de santé.

Rita Noumeir
Rita Noumeir est professeure au Département de génie électrique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur l’utilisation de méthodes d’intelligence artificielle pour créer des systèmes d’aide à la décision ainsi que le traitement vidéo et d’images.
Programme : Génie électrique
Chaire de recherche : Chaire de recherche sur le développement et validation de systèmes d’aide à la décision clinique à l’aide de l’intelligence artificielle
Laboratoires de recherche : LIVIA – Laboratoire d'imagerie, de vision et d'intelligence artificielle SYNCHROMÉDIA – Laboratoire de communications multimédias en téléprésence
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