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Automatiser le dépistage des maladies cardiaques


Mariam Afshin
Mariam Afshin est physicienne de recherche au Centre des sciences de la santé Sunnybrook. Elle était adjointe de recherche à l’Institut de recherche Robarts et GE Healthcare lorsque cette étude a été menée.

Ismail Ben Ayed
Ismail Ben Ayed Profil de l'auteur(e)
Ismail Ben Ayed est professeur au Département de génie des systèmes de l’ÉTS. Ses recherches sont à la croisée de l’optimisation, de l’apprentissage machine et de l’analyse d’images médicales.

Kumaradevan Punithakumar
Kumaradevan Punithakumar Profil de l'auteur(e)
Kumaradevan Punithakumar est directeur opérationnel et directeur de l’informatique au Centre cardiaque virtuel Servier au sein de l’Institut de cardiologie Mazankowski de l’Alberta.

Max Law
Max Law est physicien médical au Hong Kong Sanatorium & Hospital. Il était titulaire de bourse postdoctorale au GE Healthcare lorsque cette étude a été menée.

Ali Islam
Ali Islam est radiologue et professeur agrégé à l’École Schulich de médecine et de dentisterie de l’Université de Western Ontario.

Aashish Goela
Aashish Goela est radiologue et professeur agrégé à l’École School of Médecine et de dentisterie de l’Université de Western Ontario.

Terry Peters
Terry Peters est un scientifique à l’Institut de recherche Robarts et directeur du Centre de recherche en imagerie biomédicale de l’Université Western Ontario.

Shuo Li
Shuo Li est professeur agrégé à l’Université Western Ontario.

RÉSUMÉ:

Automatiser le dépistage et la localisation d’anomalies segmentaires (régionales) du ventricule gauche (VG) s’avère difficile en imagerie par résonance magnétique (IRM), car la précision laisse beaucoup à désirer. L’étude vise à examiner une méthode d’apprentissage automatique en temps réel qui se sert de certaines caractéristiques de l’image dont le calcul s’effectue facilement, mais qui dénote une corrélation claire avec la fonction segmentaire cardiaque. À partir d’une entrée minimale de l’utilisateur dans une seule image faisant partie d’un ensemble de données d’un sujet, nous établissons, pour tous les segments régionaux et pour toutes les images ultérieures, un ensemble d’éléments statistiques IRM basés sur une mesure de similarité entre les distributions. Nous démontrons que, durant un cycle cardiaque, les caractéristiques statistiques sont liées à la proportion de sang contenu dans chaque segment. Par conséquent, elles sont représentatives de la contraction segmentaire et rendent la délimitation des contours du VG dans toutes les images non nécessaires. Comparé aux évaluations vérifiées en pratique par des radiologues d’expérience, l’algorithme proposé a atteint une performance inégalée en raison d’une précision de classification finale de 86,09 % et une mesure kappa de 0,73. Mots clés : statistiques d’image, machines à vecteurs de support linéaire, LSVM, imagerie par résonance magnétique, IRM

 

Introduction

Le dépistage précoce et précis des anomalies segmentaires (régionales) du ventricule gauche (VG) en imagerie par résonance magnétique (IRM) est largement reconnu comme prédicteur des maladies cardiaques, la principale cause de décès dans le monde [1]. Lors des procédures utilisées en routine clinique, on considère la fonction cardiaque segmentaire comme un élément essentiel de diagnostic et de suivi [2]. Elle est souvent évaluée de visu suivant la norme de l’American Heart Association (AHA) [3], qui préconise la sélection de plans représentatifs de coupe du cœur 2D de manière à générer 17 segments normalisés du VG. Fondées principalement sur des évaluations visuelles, les pratiques radiologiques actuelles sont prédisposées à de fortes variabilités parmi les observateurs [4] [5], elles restent en plus subjectives et non reproductibles.

Par ailleurs, l’automatisation du dépistage et de la localisation des anomalies régionales a récemment déclenché un travail de recherche impressionnant [6] – [11], compte tenu des performances prometteuses et d’un large éventail de techniques. Cependant, en dépit de ces travaux, le problème s’avère toujours complexe, en raison de la précision qui reste de beaucoup à améliorer.

Énoncé du problème

La plupart des méthodes actuelles obligent à délimiter les contours endocardiques ou épicardiques dans toutes les images d’une séquence cardiaque, en utilisant un long processus manuel [6] – [9] ou une segmentation automatique ou semi-automatique (délimitation) [13], qui constitue en soi des calculs informatiques difficiles et coûteux, pouvant entraîner un nombre élevé d’erreurs [13]. En général, les algorithmes de segmentation exigent soit un utilisateur ayant du doigté, soit une formation manuelle intensive, ainsi qu’une lourde charge de calcul. En outre, les résultats de segmentation qui en découlent dépendent souvent du choix d’un vaste ensemble de paramètres ad hoc et de données d’apprentissage, ce qui risque de produire une grande marge d’erreur. Ces difficultés inhérentes aux algorithmes de segmentation pourraient considérablement entraver le dépistage segmentaire des anomalies de contractilité. De plus, certains des algorithmes actuels, par exemple ceux basés sur des techniques d’analyse des formes [8], requièrent des délimitations de ce genre dans la phase d’apprentissage, ce qui augmente beaucoup le nombre d’entrées manuelles et la complexité de l’apprentissage.

Les techniques courantes exigeant un immense travail, nous pensons que les images possèdent d’autres caractéristiques qui peuvent être calculées à moindre effort, mais qui néanmoins corrèlent avec la fonction cardiaque segmentaire. Une pareille technique se fonde sur des caractéristiques d’image et sur l’apprentissage automatique, et nous la décrivons comme suit.

Algorithme proposé

La contribution principale de ce travail réside dans l’élaboration de caractéristiques statistiques d’images qui n’imposent pas de segmentations et qui peuvent être facilement calculées, tout en caractérisant bien la fonction cardiaque segmentée. Les nouvelles caractéristiques éliminent le besoin de délimiter les lisières endocardiques et épicardiques dans toutes les images sur une séquence cardiaque. À partir d’une entrée minimale de l’utilisateur dans une seule image des données du patient, nous construisons pour tous les segments régionaux et toutes les images ultérieures, un ensemble de caractéristiques IRM statistiques basées sur une mesure de similarité entre les distributions. Nous démontrons que, sur un cycle cardiaque, les caractéristiques statistiques sont liées à la proportion de sang dans chaque segment. Ces caractéristiques peuvent donc définir une contraction segmentaire sans le besoin de délimiter les contours du VG dans toutes les images. Nous cherchons d’abord la direction optimale, le long de laquelle les caractéristiques d’image proposées se révèlent plus descriptives par le biais d’une analyse discriminante linéaire (LDA). Ensuite, en utilisant ces résultats comme entrées pour un classificateur de machine à vecteur de support linéaire (LSVM), on obtient une évaluation d’anomalie de chacun des segments cardiaques normalisés en temps réel.

Comparaison aux autres méthodes

Le tableau 1 compare la méthode proposée avec plusieurs autres méthodes récentes en ce qui concerne les exigences d’entrées par l’utilisateur et de segmentation, la précision, le temps de traitement, la taille des ensembles de données utilisées et les types de coupes traitées. Dans la deuxième colonne, la description « mnl-1re » signifie que la méthode correspondante nécessite une segmentation manuelle de la première image, tandis que « mnl-toutes » signifie que des segmentations manuelles sont requises pour toutes les images. « Enreg. » signifie que la méthode correspondante nécessite une action d’enregistrement au milieu des images afin de trouver la périphérie du VG dans toutes les images d’une séquence. Dans la dernière colonne, A, B et M désignent respectivement les cavités apicales, basales et médianes. Toutes les méthodes du tableau 1 analysent les coupes apicales, basales et médianes, sauf la méthode proposée par Lu et collab. [7] qui montre les résultats préliminaires pour les coupes de base seulement.

dépistage

Tableau 1 Méthode d’analyse

Conclusion

Nous avons proposé une démarche en temps réel d’apprentissage automatique et d’imagerie statistique pour automatiser le dépistage et la localisation d’anomalies segmentaires (régionales) du myocarde en IRM. Contrairement aux techniques actuelles, la méthode proposée n’a pas besoin de délimiter les contours endocardiques ou épicardiques dans toutes les images d’une séquence cardiaque. À partir d’une entrée minimale de l’utilisateur dans une seule image dans un ensemble de données d’un patient, nous avons construit un ensemble de fonctions IRM statistiques, basées sur la mesure Bhattacharyya de similarité entre les distributions, pour tous les segments régionaux et toutes les images ultérieures. Nous avons démontré par des exemples empiriques et réels que, durant un cycle cardiaque, ces caractéristiques statistiques sont liées à la proportion de sang au sein de chaque segment et peuvent donc définir la contraction segmentaire à un coût beaucoup plus faible quant au calcul et à l’effort de l’utilisateur. Nous avons recherché la direction optimale suivant laquelle les caractéristiques d’image proposées sont plus représentatives par une analyse discriminante linéaire. Ensuite, en alimentant un classificateur LSVM avec ces résultats comme entrées, nous avons obtenu une évaluation de l’anomalie de chacun des segments cardiaques normalisés en temps réel.

Nous avons rapporté une évaluation expérimentale complète de l’algorithme proposé sur 928 segments cardiaques acquis à partir de 58 sujets. Comparé aux évaluations sur le terrain par des radiologues expérimentés, l’algorithme proposé a donné une précision de classification totale de 86,09 % et une mesure kappa de 0,73. Nous avons également rapporté des comparaisons de méta-analyse grâce à plusieurs méthodes récentes qui ont montré que la méthode proposée est performante, tout en réduisant considérablement la charge de calcul et l’apport de l’utilisateur. Notons que la méthode proposée suppose que le mouvement général ou local entre deux images n’est pas conséquent. Une telle hypothèse ne pourrait être valable pour des cœurs anormaux, qui subissent un mouvement de torsion ou de grands mouvements le long d’un des axes. Dans de tels cas, la méthode proposée peut ne pas distinguer complètement une anomalie de contractilité régionale. Une prochaine exploration possible serait d’étudier l’utilisation des caractéristiques du mouvement. Une autre possibilité serait d’appliquer un algorithme de segmentation [13] à la première image afin d’automatiser complètement le processus.

Information supplémentaire

Pour plus d’informations sur ce sujet, nous vous invitons à lire l’article suivant : Afshin, Mariam; Ben Ayed, Ismail ; Punithakumar, Kumaradevan ; Law, Max; Islam, Ali ; Goela, Aashish ; Peters, Terry ; Li, Shuo. 2014. Regional Assessment of Cardiac Left Ventricular Myocardial Function via MRI Statistical Features (Évaluation locale de la fonction myocardique du ventricule gauche par caractéristiques statistiques IRM). IEEE Transactions on Medical Imaging.Vol. 33. No 2 p. 481-494.

Mariam Afshin

Profil de l'auteur(e)

Mariam Afshin est physicienne de recherche au Centre des sciences de la santé Sunnybrook. Elle était adjointe de recherche à l’Institut de recherche Robarts et GE Healthcare lorsque cette étude a été menée.

Profil de l'auteur(e)

Ismail Ben Ayed

Profil de l'auteur(e)

Ismail Ben Ayed est professeur au Département de génie des systèmes de l’ÉTS. Ses recherches sont à la croisée de l’optimisation, de l’apprentissage machine et de l’analyse d’images médicales.

Programme : Génie de la production automatisée 

Laboratoires de recherche : LIVIA – Laboratoire d'imagerie, de vision et d'intelligence artificielle 

Profil de l'auteur(e)

Kumaradevan Punithakumar

Profil de l'auteur(e)

Kumaradevan Punithakumar est directeur opérationnel et directeur de l’informatique au Centre cardiaque virtuel Servier au sein de l’Institut de cardiologie Mazankowski de l’Alberta.

Profil de l'auteur(e)

Max Law

Profil de l'auteur(e)

Max Law est physicien médical au Hong Kong Sanatorium & Hospital. Il était titulaire de bourse postdoctorale au GE Healthcare lorsque cette étude a été menée.

Profil de l'auteur(e)

Ali Islam

Profil de l'auteur(e)

Ali Islam est radiologue et professeur agrégé à l’École Schulich de médecine et de dentisterie de l’Université de Western Ontario.

Programme : Génie technologies de la santé 

Profil de l'auteur(e)

Aashish Goela

Profil de l'auteur(e)

Aashish Goela est radiologue et professeur agrégé à l’École School of Médecine et de dentisterie de l’Université de Western Ontario.

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Terry Peters

Profil de l'auteur(e)

Terry Peters est un scientifique à l’Institut de recherche Robarts et directeur du Centre de recherche en imagerie biomédicale de l’Université Western Ontario.

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Shuo Li

Profil de l'auteur(e)

Shuo Li est professeur agrégé à l’Université Western Ontario.

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